La séparation ou le divorce requiert de nombreux ajustements aux membres de la famille. Le plan parental est l’outil par excellence pour faciliter cette réorganisation familiale.
Me Louis Baribeau, avocat et médiateur familial
Il sert aussi à prévenir et régler les relations tendues ou conflictuelles entre les parents qui peuvent engendrer des problèmes psychologiques graves chez les enfants à court et long terme. Nous en traitons dans l’article Les effets du conflit parental sur les enfants et dans Enfants pris au piège : le conflit de loyauté.
Qu’est-ce qu’un plan parental?
Il établit les responsabilités entre les parents et à l’égard des enfants, en particulier :
-la garde des enfants et leur lieu de résidence;
-le calendrier de garde;
-l’horaire et lieux des changements de garde;
-le temps parental lors des vacances ou événements spéciaux (fêtes hivernales, Pâques, vacances annuelles, anniversaires de naissance des parents ou des enfants, fêtes des mères ou des pères, congés fériés);
-les ententes quant au montant de la pension alimentaire pour les enfants, les modalités de versement, le suivi des revenus des parents aux fins du calcul de la pension;
-les dépenses spéciales ou frais particuliers à prévoir pour les enfants (notamment les frais de garderie, activités sportives, frais de santé non remboursés par les assureurs), qui effectuera ces dépenses et les modalités de partage, la production des factures, les délais de remboursement entre les parents, les demandes de remboursement des frais de santé à l’assureur;
-l’assurance collective de quel parent couvrira les médicaments de l’enfant;
-la participation des parents aux programmes gouvernementaux (allocations familiales, crédit d’impôt pour enfant à charge);
-autorisations de voyage à fournir, demande de passeport et conservation du passeport;
-les communications entre les parents;
-les moyens pour régler les litiges entre les parents.
Le plan parental a-t-il une valeur légale?
Votre plan parental peut être inscrit dans le résumé des ententes verbales qu’a préparé pour vous, mis par écrit et signé le médiateur familial. Sous cette forme, il s’agit surtout d’un aide-mémoire.
Pour avoir une valeur légale, le plan parental doit être incorporé dans une entente écrite de séparation signée par les deux parents.
Si vous comptez divorcer à l’amiable, vous devrez nécessairement conclure et signer une entente qu’on appelle Projet d’accord, lequel sera joint à votre demande en divorce et qui devra être entériné (homologuée) par la cour dans le jugement de divorce.
Est-il nécessaire de faire entériner (homologuer) par la cour l’entente intervenue entre les parents?
L’entente non entérinée peut être modifiée par la cour. L’entente entérinée par le tribunal est reconnue comme valable et ne peut être modifiée que si un changement important survient dans la situation des parents et de l‘enfant.
Il sera plus facile d’obliger un parent à respecter une entente si elle est entérinée. Si vous pensez que votre ex-conjoint risque de ne pas respecter l’entente, il est possible que vous ayez intérêt à faire entériner votre entente. Discutez-en avec votre avocat.
Pour divorcer à l’amiable, votre entente sera nécessairement entérinée par la cour.
L’entente écrite entre les parents est-elle définitive ?
Elle peut être intérimaire ou provisoire. Elle établit alors les modalités de fonctionnement temporaires de la famille pendant que les parents sont en réflexion ou en négociations en vue d’en arriver à une entente finale ou en attendant que la cour rende un jugement final sur leur cas.
Le plan parental peut aussi être inclus dans une entente finale.
Quel est le meilleur type de garde pour les enfants?
Il y a 4 types de garde :
-la garde exclusive (le parent gardien a 80% ou plus du temps de garde, l’autre parent a accès à l’enfant entre 0 et 20%);
-la garde exclusive avec droits d’accès prolongés (le parent gardien a entre 79 et 61% du temps de garde, l’autre parent a des droits d’accès entre 21 et 39% du temps);
-la garde partagée (les deux parents ont une garde d’au moins 40% du temps avec l’enfant);
-le «nesting» (les enfants demeurent dans la résidence principale alors que les parents viennent y résider avec eux à tour de rôle).
La garde idéale est celle qui est le mieux adaptée à l’intérêt des enfants et à la situation des parents. Pour vous aider à négocier la meilleure garde possible, consultez l’article Les 4 modèles de garde après la rupture : leurs avantages et inconvénients.
La garde des jeunes enfants comporte des enjeux particuliers reliées à l’attachement. Nous traitons en détail de ce sujet dans notre article Quelle garde pour les jeunes enfants?
Qu’est-ce qu’un droit d’accès?
Il s’agit du droit d’un parent (dans le cas où l’autre parent a une garde exclusive) d’entrer en contact avec son enfant, c’est-à-dire du droit de le visiter, de le sortir, avec ou sans coucher, du droit de l’appeler au téléphone, etc. Les modalités des droits d’accès sont établies en même temps que les modalités de garde, soit par entente négociée, soit par jugement de la cour. Lorsque les parents ont des difficultés de négociations, il est conseillé de déterminer précisément dans le plan parental, pour prévenir les conflits, la fréquence des droits d’accès, en précisant les jours de la semaine, les heures et les congés particuliers où le parent non-gardien pourra les exercer.
Lorsque le parent non-gardien risque d’avoir un comportement inacceptable à l’égard de l’enfant, l’entente ou le jugement de la cour peut prévoir que les droits d’accès soient supervisés par une personne de confiance ou un organisme du réseau des Maisons de la famille. Celles-ci offrent un service de supervision des droits d’accès et peuvent fournir des rapports sur le déroulement des rencontres entre l’enfant et le parent non-gardien, rapports qui peuvent servir à la cour.
À qui peut-on accorder des droits d’accès?
Les droits d’accès sont généralement accordés au parent non-gardien, mais ils peuvent aussi être accordés aux grands-parents, ainsi qu’à des personnes jouant un rôle significatif dans la vie d’un enfant, par exemple, le conjoint d’un parent.
Comment se prennent les décisions au sujet des enfants après la séparation?
Chaque parent prend seul les décisions courantes de la vie quotidiennes à l’égard de l’enfant quand il est avec lui. Ainsi, il décide, sans avoir à demander l’autorisation de l’autre parent, comment l’enfant s’habille, ce qu’il mange, l’heure des repas, de coucher et du réveil, l’encadrement, l’habillement, l’hygiène quotidienne, etc.
Cependant, les décisions importantes continuent d’appartenir aux deux parents, mêmes s’ils sont séparés et peu importe le type de garde retenu. Il s’agit notamment des décisions en matière de santé et d’éducation. Les parents ont à échanger et négocier pour se mettre d’accord sur ces questions. S’il leur est impossible de s’entendre, le tribunal pourra trancher le litige en tenant compte de l’intérêt de l’enfant.
Pour en savoir plus sur la prise de décision au sujet des enfants, voyez l’article Qui décide pour l’enfant?
Si les parents ne s’entendent pas sur la garde, selon quels critères, la cour basera son jugement?
La décision sera guidée par le meilleur intérêt de l’enfant, en tenant compte, entre autres, des critères suivants :
-la santé physique et psychologique de l’enfant et de chacun des parents;
-les besoins de l’enfant;
-la capacité de chacun des parents de répondre aux besoins de l’enfant;
-la relation déjà établie entre l’enfant et chacun des parents;
-les liens affectifs entre lui et les membres de sa famille;
-son besoin de stabilité par rapport à son milieu de vie et ses liens affectifs;
-la disponibilité effective de chaque parent à s’occuper de lui;
-l’importance pour un enfant de ne pas vivre séparé de ses frères et sœurs;
-la compatibilité des habitudes de vie des parents avec la satisfaction des besoins de l’enfant;-la volonté de chacun des parents de maintenir des liens entre l’enfant et l’autre parent; et
-l’âge de l’enfant.
Les tribunaux peuvent également tenir compte de l’opinion de l’enfant, en fonction de son âge et de sa maturité. En général, l’opinion de l’enfant entrera en ligne de compte à partir de l’âge de 8 ans. À compter de 12 ans, son opinion sera plus fortement prise en compte et pourra même être le critère déterminant dans la décision d’un juge.
Par ailleurs, en décidant de la garde de l’enfant, le juge ne tient pas compte des critères suivants :
- les ressources financières de chacun des parents, puisque de toute façon une pension alimentaire pourra être fixée pour répondre aux besoins de l’enfant;
- le fait que le parent gardien vive ou fréquente une autre personne, sauf si cela va à l’encontre de l’intérêt de l’enfant, par exemple, si le nouveau conjoint est violent;
- l’orientation sexuelle des parents;
- l’héritage culturel des parents.
Un parent peut-il demander une modification de la garde ou d’autres éléments du plan parental?
Les ententes de séparation doivent évoluer au gré des besoins des enfants et de la situation des parents.
Les modalités de garde peuvent être modifiées s’il survient un changement important dans la situation de l’enfant ou des parents.
Voici quelques exemples de cas où on peut demander un changement de garde :
- le déménagement d’un parent dans un endroit éloigné; cela cause souvent un litige. Voyez notre article La garde des enfants après le déménagement d’un parent où nous traitons ce sujet en détail;
- l’incapacité d’un parent de répondre à un nouveau besoin de l’enfant;
- un parent qui agit de manière à priver l’ex-conjoint de son droit d’accès;
- le désir de l’enfant d’aller vivre avec l’autre parent;
- l’âge de l’enfant, le rendant plus apte à un autre type de garde comme la garde partagée;
- le parent est redevenu capable de s’occuper de son enfant, par exemple, après s’être relevé d’une maladie.
En cas de mésentente, un des conjoints peut s’adresser à la cour qui tranchera en fonction du meilleur intérêt de l’enfant. Une demande à la cour n’est pas acceptée automatiquement. Un avis juridique préalable est nécessaire afin d’évaluer les possibilités que la demande soit acceptée ou refusée.
Conseils aux ex-conjoints
Certaines de vos décisions prises sous le coup de l’émotion peuvent avoir des conséquences regrettables pour vous et les enfants lors d’un divorce ou d’une séparation.
Aux parents qui veulent quitter la résidence familiale
Pensez-y avant de partir avec les enfants
Lors de la rupture, les enfants ont besoin de se sécuriser par certains points d’ancrage avec leur milieu de vie: leur maison, leur chambre, la proximité de leurs amis et de leurs loisirs habituels… C’est pourquoi, lorsque la cohabitation entre conjoint n’est plus possible, la loi permet à la Cour d’ordonner à un des parents de quitter la résidence familiale pour permettre à l’autre d’y habiter seul avec les enfants. Ce type d’ordonnance est possible si vous êtes marié ou conjoint de fait et même si le seul signataire du bail est votre conjoint ou s’il est le seul propriétaire de votre condo ou maison.
Contactez un avocat pour vous aider à négocier le départ de l’autre parent de la maison ou, s’il n’y pas d’entente possible à ce sujet, évaluer l’opportunité de demander à la cour de vous accorder l’usage exclusif de la résidence avec les enfants.
Il pourrait être trop tard, si vous quittez la résidence sans avoir réglé ces questions.
Pensez-y avant de partir en laissant les enfants à l’autre parent… en attendant
Les tribunaux peuvent présumer que vous avez laissé les enfants à votre ex-conjoint, parce que c’était le mieux pour les enfants. Les tribunaux ont tendance à privilégier la stabilité de la garde et pour cette raison hésiteront à modifier un état de fait dont les enfants ne semblent pas souffrir. Pour cette raison, il est important au moment de la rupture, sans attendre, de se pencher attentivement sur les questions de garde pour négocier une entente dans le meilleur intérêt des enfants ou si nécessaire de s’adresser à la cour pour faire trancher litige.
Si votre séparation est conflictuelle, exigez une entente écrite approuvée par votre avocat
Avec une entente écrite établissant les droits de garde et des balises claires pour l’exercice des sorties ou accès de l’autre parent, s’il y a lieu, il sera plus facile de faire valoir vos droits. Envisagez en plus, avec votre avocat, de faire entériner cette entente pour lui donner plus de poids et ainsi faciliter l’exercice de vos droits.